Mon enfant subit une situation de harcèlement scolaire : que faire juridiquement ?

Vous constatez un changement dans l’attitude positive de votre enfant lorsqu’il va ou revient de l’école. Peut-être qu’il y a lieu de s’interroger sur le lien de causalité entre l’environnement scolaire, notamment les acteurs divers qui l’animent, aussi bien les camarades que le personnel encadrant, et la dégradation observée de l’état de santé de votre enfant ? Ce lien n’est jamais à écarter et il doit toujours être vérifié en cas de doute.

En l’espèce, un enfant en surpoids a subi pendant des mois, au sein de son ancien établissement scolaire, un collège, des moqueries et réflexions désobligeantes répétées de ses camarades, plus précisément d’un même groupe. Cet enfant en a fait part à son père qui a immédiatement et adroitement adressé un courrier LRAR de signalement au directeur de l’établissement avec en copie le recteur de l’académie. Cette initiative parentale est une première pierre à l’édifice juridique.

En effet, un courrier, toujours adressé en accusé de réception, permet de mettre des mots écrits sur des événements et de dater les faits dans le temps, les inscrivant sur une échelle temporelle indispensable afin de confronter l’administration à l’efficacité ou l’inefficacité, pour ne pas dire l’inertie, de son action. En ce sens, l’attente parentale s’érige dans l’intervention diligente de l’administration à traiter efficacement la situation de harcèlement à la racine, c’est-à-dire d’une part par la prévention d’autre part la sanction des élèves fautifs.

Toutefois, les parents de l’enfant ont constaté à leur grand regret une absence d’intervention aussi bien de l’administration scolaire que du rectorat. Malgré plusieurs courriers réceptionnés par l’établissement, l’enfant a continué d’être la cible de ses mêmes camarades, y compris lors des cours, sans aucune réaction des professeurs… L’absence de réaction du corps professoral peut toucher la qualification pénale de « non-assistance à personne en danger » en application de l’article 223-6 du Code pénal.

L’article L. 111-6 du Livre Ier, Titre Ier du Code de l’éducation dispose :

« Aucun élève ou étudiant ne doit subir de faits de harcèlement résultant de propos ou comportements, commis au sein de l’établissement d’enseignement ou en marge de la vie scolaire ou universitaire et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de dégrader ses conditions d’apprentissage. Ces faits peuvent être constitutifs du délit de harcèlement scolaire prévu à l’article 222-33-2-3 du code pénal.

Les établissements d’enseignement scolaire et supérieur publics et privés ainsi que le réseau des œuvres universitaires prennent les mesures appropriées visant à lutter contre le harcèlement dans le cadre scolaire et universitaire. Ces mesures visent notamment à prévenir l’apparition de situations de harcèlement, à favoriser leur détection par la communauté éducative afin d’y apporter une réponse rapide et coordonnée et à orienter les victimes, les témoins et les auteurs, le cas échéant, vers les services appropriés et les associations susceptibles de leur proposer un accompagnement. ».

Le Code pénal sanctionne sévèrement les faits de harcèlement en milieu scolaire. A cet égard, de nombreux événements tragiques sont survenus par le passé en raison de faits de harcèlement commis à l’encontre d’un élève ou d’une élève utilisé comme « ressort » ou « punching ball » à moqueries et inimitié. La maltraitance répétée a pour double effet d’isoler toujours plus la victime et la placer dans une situation d’extrême vulnérabilité.

Bien que le Code pénal soit suffisamment explicite sur les sanctions encourues (de trois ans à dix ans d’emprisonnement et une amende pouvant atteindre 150 000 euros, la variable d’ajustement de la peine se comprend selon l’état de santé de la victime), force est de constater une recrudescence du phénomène de harcèlement scolaire par le truchement notamment des nouvelles technologies, à commencer par les réseaux sociaux.

Pour rappel, le harcèlement se caractérise à la lecture de l’article 222-33-2-2 du Code pénal comme le « fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale ».

Le vécu de l’enfant en surpoids en l’espèce correspond à la définition que nous donne aussi bien le Code pénal que le Code de l’éducation à savoir : des propos et comportements répétés (dans un cadre ou en marge de l’établissement scolaire) ayant eu pour effet une dégradation des conditions de vie scolaire et personnelle se traduisant par une altération de l’état de santé physique ou mental.

Lorsque l’administration délaisse le problème, il convient de collecter des pièces et constituer un dossier aux fins de saisine de la juridiction administrative :

Courriers d’alerte et de dénonciation restés sans réponse, les justificatifs médicaux montrant une détérioration lente ou rapide de l’état de santé, en particulier ceux d’un médecin spécialiste, les témoignages d’autres enfants ou de parents sensibilisés à la situation, etc.

L’inertie administrative suppose que celle-ci soit contrainte par la voie juridictionnelle d’agir, faute d’initiative. La demande indemnitaire préalable qui lui est adressée secoue et provoque en principe la mécanique administrative, mais n’est pas suffisante car l’administration, lorsqu’une inertie fautive a été commise, peut garder le silence.

La saisine contentieuse de la juridiction administrative visant à engager la responsabilité de l’établissement scolaire s’avère indispensable, car le juge dispose d’outils contraignant l’administration à prendre des mesures soit dans des délais raisonnables soit sans délai selon les circonstances de l’affaire. En outre, le juge peut condamner l’administration à réparer l’ensemble des préjudices subis par l’enfant et la famille.

En parallèle de l’action en justice devant le tribunal administratif, il peut être envisagé l’action sur le plan civil ou encore le terrain pénal, le dépôt d’une plainte étant un déclencheur.

Je vous accompagne dans vos démarches amiables ou contentieuses aussi bien devant les juridictions administratives que civiles, en cas de besoin à l’aide juridictionnelle.

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